Benjamin Baroche : « Teyssier (Ici tout commence) et Gustave (Créanciers) sont des mecs increvables... Ils ne lâchent pas ! »

Valentin Delepaul : Vous évoluez dans Créanciers, une pièce tragi-comique. Depuis combien de temps n’étiez-vous pas remonté sur scène ?

Benjamin Baroche : Depuis 2004, j’avais joué Richard II, un Shakespeare. Philippe Calvario (le metteur en scène, NDLR) est venu me chercher. Quand on sort du théâtre public, on se met à faire de l’image et on a d’autres objectifs. Puis on se dit ‘va falloir que moi-même j’aille repêcher tout seul’, j’étais en train de penser à ça avant de décrocher Teyssier. J’avais écrit un seul en scène sur cela.

Quel genre préférez-vous jouer ?

C’est comme choisir entre son père et sa mère. Dans la tragédie, il y a de la comédie et vice versa. Je suis très heureux, parce que ça faisait vingt ans que je n’étais pas monté sur un plateau. Merci à Philippe de me faire revenir avec du Strindberg. Parce que vraiment, j’aurais pu jouer autre chose et j’aurais été très content, ce n’est pas le problème. Mais là, j’ai eu très peur dès le départ parce que la partition était très compliquée, je l’ai tout de suite senti. L’adaptation était très belle. Évidemment, la position du curseur était haute, mais je me suis dit c’est un défi formidable de pouvoir jouer ce mec-là avec ce texte-là. Dans chaque réplique, il y a un truc qui est drôle et en même temps pas drôle, c’est du venin.

Après la représentation du 19 mars 2023, la pièce sera rejouée en novembre-décembre. Aimeriez-vous jouer en Province, car les fans d’Ici tout commence souhaiteraient vous voir près de chez eux ?

Jouer cette partition seulement quinze fois, je trouvais ça dommage. Quand on m’a proposé de reprendre le théâtre, c’était une très bonne nouvelle, car on va pouvoir continuer le voyage et explorer. Si on peut le jouer dehors, ce serait super.

Dans cette pièce, qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre personnage de Gustave ?

Le côté dark et sociopathe. J’ai mis un faux ongle noir et une bague noire au personnage comme signes extérieurs, car cela me parle pour incarner ce genre de type. Il y a un côté masochiste chez lui. C’est un aliéné, un mec qui a décidé de vivre avec la haine et non avec l’amour. Il aime faire du mal.

« J’ai rêvé du théâtre pendant vingt ans »

Quel a été votre ressenti après la première de Créanciers le 2 mars 2023 ?

J’avais beaucoup de pression. Dès qu’il m’a proposé le rôle au mois d’août, j’avais le trac. Je me suis senti libéré en me disant ‘c’est pour de vrai’. J’ai rêvé du théâtre pendant vingt ans et là c’est la réalité. À la fin de la pièce, j’ai ressenti le début d’un travail, car elle n’est pas facile à jouer. Dès que je finis sur scène, je parle avec mon metteur en scène et avec Marlène Da Rocha (qui a collaboré à l’adaptation et à la mise en scène de la pièce, NDLR). Elle n’est pas sur scène et c’est elle qui entend vraiment la partition. Elle est là depuis le début des répétitions.

Avez-vous accepté tout de suite la proposition malgré vos emplois du temps chargés ?

J’ai tout de suite appelé Philippe pour accepter, car je connaissais son travail. J’ai ensuite appelé la production d’Ici tout commence pour leur expliquer et ils étaient très heureux. Je pense que pour eux c’est gagnant que sur une quotidienne de TF1, on me propose un rôle de Strindberg, car ils savent que je viens du théâtre public. Quand Vincent Meslet (le producteur d’ITC, NDLR) m’a engagé, il m’a dit : ‘Je sais que tu viens du théâtre public, que tu fais des films d’auteur, que tu écris et il faut que tu continues’. Cela montre que pour TF1 et une série quotidienne Newen, on peut faire ce pont. On est avant tout acteur.

Est-ce difficile de switcher de personnage entre Teyssier dans Ici tout commence en début de semaine et Gustave au théâtre à la fin de la semaine ?

Non, car l’un nourrit l’autre. Le plus fatigant est de faire les allers-retours. Apprendre le texte de Gustave alors que je continue à tourner Ici tout commence, j’ai eu peur de ne pas y arriver. C’est simplement de la fatigue et psychiquement il fallait que j’aie du cerveau libre. Tous les soirs, je n’ai pas vécu ma vie normale. Je me suis excusé auprès de ma femme et j’apprenais le texte de Gustave. J’ai fait ça pendant deux mois et demi. C’était la condition sine qua non sinon je n’y arrivais pas. Ce n’était pas possible d’arrêter temporairement la série. Fallait que je m’accroche.

Quels sont les points communs entre votre personnage de Gustave dans la pièce et de Teyssier dans Ici tout commence ?

Il retombe toujours sur ses pattes. Ce sont des mecs increvables. Tant qu’ils n’ont pas eu ce qu’ils voulaient, ils ne lâchent pas.

« Cela ne sera plus jamais pareil entre Teyssier et Clotilde dans Ici tout commence »

Globalement, qu’est-ce qui attend Teyssier dans les prochaines semaines ?

Il y a une catastrophe qui arrive. Suspens…

Qu’avez-vous ressenti en découvrant le scénario sur les origines d’Axel, qui est le fils d’Auguste Armand ?

C’est shakespearien, j’aime bien quand ils font des choses comme cela avec les histoires d’héritage. C’est vraiment l’ADN de la série.

Comment Teyssier va faire face aux derniers rebondissements le concernant avec notamment Clotilde, qui est impliquée dans l’histoire de la cocaïne retrouvée chez lui cinq ans plus tôt ?

C’est un truc qui l’a rendu fou. C’est une grande et énorme trahison pour lui. Cela ne sera plus jamais pareil entre Teyssier et Clotilde. Cela va vraiment changer le destin du personnage maintenant qu’il sait qu’elle a planqué de la cocaïne chez lui pour qu’il se fasse arrêter par les flics et qu’il ne monte pas sa pâtisserie. Teyssier c’est un mec qui a perdu comme Gustave, mon personnage dans la pièce. C’est un mec brillant qu’on a aussi défoncé.

Théo se rapproche d’Anaïs. Celle-ci ne serait-elle pas la belle-fille idéale pour Teyssier puisque Marta, Célia et Vic étaient des « folles » pour lui ?

Mais le fils est encore plus fou que le père. Je pense qu’il n’y a aucune chance pour que Théo vive une histoire d’amour normal.

« Théo est encore plus fou que Teyssier »

Vous avez déclaré que votre contrat se terminait en juillet 2023. Une déclaration qui a fait beaucoup réagir les fans, au point que certains menacent de ne plus regarder la série en cas de départ. Au début du feuilleton vous étiez le méchant, au point de recevoir des lettres d’insultes, et aujourd’hui vous êtes considéré comme le pilier. Que ressentez-vous ?

Une énorme reconnaissance. Les gens sont super et sont extrêmement généreux à chaque fois qu’ils viennent me voir. C’est vraiment extraordinaire pour un acteur de vivre ça. J’essaie d’être le plus gentil, le plus généreux possible même quand je suis fatigué. Le fait qu’ils viennent voir du Strindberg c’est génial.

Ne vous sentez-vous pas prisonnier de votre personnage ?

Le jour où je me sentirais un peu prisonnier, je partirais. Mais là, ce n’est absolument pas le cas. Je prends les choses au jour le jour. Je verrais en juillet ce qu’il se passera, je parlerais avec les producteurs.

Créanciers se joue au théâtre de l’Épée de bois, à Vincennes, du jeudi au samedi à 19 heures et du samedi au dimanche à 14h30 jusqu’au 19 mars. La pièce sera rejouée du 9 novembre au 3 décembre 2023.