Toutelatele

Nathalie Renoux (Enquêtes Criminelles, Jonathann Daval) : « La police a eu des soupçons dès le départ »

Joshua Daguenet
Par
Rédacteur TV & Séries
Publié le 23/05/2018 à 18:35 Mis à jour le 02/10/2019 à 12:17

Joshua Daguenet : Enquêtes Criminelles réalise une très belle saison en terme d’audience...

Nathalie Renoux : Le bilan est très positif cette saison, encore plus que la précédente. Plusieurs éléments l’expliquent : nous avons plus d’inédits avec un public d’aficionados au courant lorsqu’il s’agit de rediffusions. Nous avons approfondi notre art du récit et nous progressons dans l’image et les interviews réalisées. Nous sommes légitimes et n’avons jamais eu de procès. Nos témoins sont majeurs et très proches de l’affaire. Les directs ont aussi contribué au succès avec l’affaire Grégory et Maëlys. Cela actualise et dynamise le magazine.

Quel est le dispositif mis en place pour la spéciale Jonathann Daval ?

Cette affaire est particulière car elle est encore très fraîche dans les esprits. Les Français ont l’impression de connaître tous les détails de l’enquête mais nous avons apporté dans ce documentaire la photographie d’un village et les rapports psychologiques liant les uns aux autres. Nous avons aussi détaillé la façon dont la police s’est servie de l’analyse de comportementalistes pour suivre Jonathann et établir quand il disait la vérité et quand il mentait.

Quels éléments ont permis de supposer que Jonathann avait tué sa femme ?

Dès le départ, la police avait des soupçons très forts et pas seulement parce qu’il était le mari. Par expérience, les crimes de rôdeurs sont beaucoup plus rares que les crimes intra-familiaux. Lors d’un rassemblement d’hommages à Alexia, Jonathann était en larmes et soutenu par son beau-père puis ils sont montés sur une tribune pour parler de la défunte. Dans la foule, la police avait des observateurs en civil, spécialistes du comportement. Quand nous les avons interrogés, l’un des experts a indiqué que ses pleurs étaient sincères mais, par moment, il mettait sa main devant sa bouche. Le comportementaliste estimait alors que ce signe démontrait que Jonathann savait qu’il ne devait pas trop en dire et qu’il risquait de se dénoncer lui-même.

Il a contrôlé le niveau de ses émotions pour jouer la comédie...

Autant dans certaines affaires il existe des veuves joyeuses mais lui était vraiment éploré. Sa tristesse n’était pas feinte mais son comportement dénotait un certain stress par la prise de parole, de peur de trop en dire. Sans caricaturer, Jonathann vient d’un petit milieu et a épousé une jeune femme de bonne famille. La réussite sociale est aussi une part de cette affaire.

« Les soupçons envers cet homme, pleurant lors de l’enterrement et des hommages, offrent une posture incroyable »

La couverture médiatique de cette affaire se justifie-t-elle par une identification des Français à travers ce couple, d’apparence ordinaire ?

Je crois que oui. Au départ, l’actualité n’est pas démentielle et, en cas d’attentat, l’affaire Alexia Daval aurait moins passionné les gens. C’est le cynisme de l’actualité. Les gens s’y sont intéressés car cette jeune femme était très belle et que beaucoup d’entre-elles font du jogging... il y a l’angoisse que cela leur arrive. Il y a aussi des rumeurs et les premières craquelures malgré le soutien de la belle-famille de Jonathann. Les soupçons envers cet homme, pleurant lors de l’enterrement et des hommages, offrent une posture incroyable. Quand je présente les journaux, nous livrons des faits, et pour ce magazine, nous creusons pour reconstituer le puzzle.

Le prochain numéro de Que s’est-il vraiment passé ? est consacré à l’héritage de Johnny Hallyday. Pourquoi un tel intérêt des Français à cette affaire ?

Dans l’affaire Jonathann Daval, les Français se sont identifiés à cet homme et ont été fascinés par ses mensonges. Pour Johnny, la célébrité de cet homme - le dernier homme a voir eu de tels obsèques a été Victor Hugo -, la popularité de cette star, la mise en scène de sa vie personnelle expliquent cet intérêt. Laetitia et Johnny nous ont offerts leur vie.

Depuis la fabrication de ce documentaire, beaucoup de rebondissements ont nourri l’affaire...

C’est le risque à prendre. D’autres documentaires ont été commencés au même moment du début de l’affaire. Nous bouclerons le document au dernier moment et si d’autres éléments apparaissent en amont, nous pourrons les projeter à travers un nouveau film. Dans Enquêtes Criminelles, nous alternons des affaires terminées et d’autres en cours. Cela aurait été une faute de ne pas traiter les affaires Maëlys et Jonathann Daval, quitte à proposer un sujet plus froid dans un second temps.