La redevance, une taxe trop faible en France ?
Un an après l’émission C dans l’air d’Yves Calvi sur France 5, c’est France 2 qui a décidé d’aborder au grand jour, cette année, la fameuse redevance TV. Ainsi, le 27 novembre dernier, Françoise Laborde et Marc Tessier ont animé l’émission Spécial redevance. Différents thèmes ont été abordés avec des spécialistes (producteurs et parlementaires) en vue d’informer les téléspectateurs sur l’utilité et l’usage fait de la redevance.
Alors que beaucoup de français, les plus âgés en l’occurrence, continuent de penser que la redevance finance non seulement les chaînes publiques mais également les chaînes privées, l’émission a eu pour vocation de lever une fois pour toute cette idée reçue en insistant bien sur sa répartition entre les différents organismes publics.
Tout d’abord, le groupe France Télévisions est le principal bénéficiaire en recueillant 60% (31% pour France 3, 24% pour France 2, 5% pour France 5) du montant prélevé chaque année aux 23 millions de foyers redevables de cette taxe parafiscale, ce qui représente la bagatelle de 1,5 milliard d’euros sur les 2,6 milliards prélevés en 2004. Radio France est le second bénéficiaire avec 19% du montant global, un groupe public qui englobe entre-autres les stations de radio, France Inter, France Info, France Culture ou encore France Musique. Viennent ensuite à égalité, la chaîne franco-allemande Arte et la chaîne d’Outre-Mer, RFO avec 8% chacune, le solde venant à l’Institut National de l’Audiovisuel et à Radio France International.
L’accent a été mis sur les investissements conséquents du groupe France Télévisions dans la création (fictions, films, documentaires et programmes pour la jeunesse) qui représentent le tiers de la redevance perçue par le holding public, soit le poste le plus important aux côtés de l’information.
Alors que 1987 marque la privatisation de TF1 et l’unique baisse significative de la redevance de 541 à 506 francs, les téléspectateurs français payaient chaque jour 1,3 franc, l’équivalent de 0,20 euro aujourd’hui, pour regarder la télévision et écouter la radio. Le même téléspectateur doit aujourd’hui débourser 0,32 euro par jour, soit 116,5 euros annuellement, ce qui en fait pourtant l’une des redevances les moins chères d’Europe avec l’Irlande et l’Italie.
Le faible montant de la redevance payée par les français, en comparaison des pays voisins, trouve son explication dans le régime quasi mixte pratiqué dans l’hexagone où les télévisions publiques, en l’occurrence les chaînes du groupe France Télévisions, se financent à la fois au travers de l’argent public à hauteur des 2/3, mais aussi des ressources publicitaires pour 1/3.
Si la durée légale d’écrans publicitaires sur les chaînes publiques françaises est passée de 12 minutes par heure à 8 minutes en 2000, la durée légale en Allemagne est plafonnée à 20 minutes par jour sachant qu’après 20 heures plus aucune publicité n’est autorisée sur les télévisions publiques. En Grande-Bretagne, la BBC se finance exclusivement au travers de la redevance (121 livres, soit 173 euros par contribuable) contre 80 à 85% pour les chaînes publiques allemandes.
Pendant que la France opte pour une baisse symbolique de la redevance en 2005 de l’ordre de 0,5 euro pour s’établir à 116 euros, le reste de l’Europe, et en l’occurrence l’Allemagne, décide d’augmenter plus significativement le montant actuel de cette taxe. Les téléspectateurs allemands devront ainsi débourser 207 euros en 2005, et ce, dans les quatre années à venir, contre 194 euros actuellement en raison de la santé financière préoccupante des chaînes publiques. La ZDF devant afficher un déficit de 200 millions d’euros cette année et ce malgré les 6,5 milliards d’euros qui sont entrés dans les caisses des chaînes publiques ARD et ZDF. Dans le même temps, les chaînes publiques françaises doivent se contenter pour trois d’entre elles de 1,5 milliard d’euros et continuent d’afficher des bénéfices récurrents réinvestis totalement dans les programmes.
Alors que le débat est lancé en Espagne sur la légitimité de diffuser des publicités sur les chaînes publiques qui perçoivent 700 millions d’euros de revenus supplémentaires, beaucoup de téléspectateurs français se plaignent des publicités abondantes sur les chaînes publiques. Une baisse significative ou une suppression pure et simple des écrans publicitaires sur ces mêmes chaînes équivaudrait à une augmentation équivalente du montant de la redevance, ce à quoi une grande majorité de téléspectateurs se refuse...