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Guénaëlle Troly (Directrice de RMC Découverte) : « Nous sommes le premier pays au monde à adapter Retour à l’instinct primaire ! »

Publié le 29/08/2018 à 18:59

RMC Découverte lance sa saison 2018 /2019 avec sa nouvelle production « Retour à l’instinct primaire » avant l’arrivée de trois autres formats « Escape », « Off Roads » et « Montana Wild ». Très active en terme de nouveautés et productions exclusives, elle a enchaîné les records (2.4% en mai) et se retrouve première chaîne TNT en durée d’écoute. Guénaëlle Troly, directrice générale, revient sur ce succès et les nouveautés distillées tout au long de cette nouvelle saison. Rencontre.

Benjamin Lopes / Jérôme Roulet : Avec 2.2% de part d’audience sur l’ensemble de la saison 2017 /2018, RMC Découverte ne cesse de progresser jusqu’à être une des chaines les plus regardées de la TNT. Quelle analyse en tirez-vous ?

Guénaëlle Troly : On avait dit que l’on irait progressivement, car on ne peut pas tout faire d’un coup. On voulait prendre notre temps pour faire les choses au mieux. Bien programmer les productions, travailler avec de nombreux producteurs différents... Tout ce travail se met en place. De plus, on a gardé cette ligne particulière, ce qui fait que les téléspectateurs y trouvent des choses intéressantes, et sont ravis d’y retourner. Peu à peu, on en agrège de nouveaux. C’est ce travail qui est fait.

Estimez-vous que la position du canal 24 reste toujours un handicap pour attirer l’audience ?

Ce numéro n’est pas facile… Ce n’est pas pour rien qu’on a entendu dire que Franceinfo, en 27, aimerait être ramenée en 14. On aimerait tous être amenés en 14 ! Le quotidien n’est donc pas évident pour une chaine comme la nôtre, car les téléspectateurs doivent passer de la 1 à la 24. Mais, petit à petit, le chemin se fait.

RMC Découverte est la deuxième chaîne auprès des hommes 25/49 ans. Cette cible n’est-elle pas cependant difficile à commercialiser ?

On a une régie intégrée qui connait bien cet univers puisqu’elle commercialise depuis le début la radio RMC, qui a une cible plutôt masculine avec le sport et l’info, et BFM TV est en majorité consommée par les hommes. Après, des émissions sont plus équilibrées en fonction des thématiques ou de la programmation comme La France des mystères et Hors de contrôle. On est heureux avec cette cible-là et la régie sait très bien la travailler.

L’objectif n’est-il pas cependant d’élargir la cible et d’attirer les femmes de moins de 50 ans, entre autres ?

On n’a jamais cherché à écarter la ménagère de moins de 50 ans. Mais ce n’est pas notre réflexe premier, qui est l’individu 25/49 ans, une cible jeune assez rare dans cet univers. La progression de la chaine à la 10e place est rare dans un paysage audiovisuel aussi occupé. C’est en cela que l’on n’a pas touché notre ligne éditoriale depuis 2012. On veut garder notre ADN. On a vu que les téléspectateurs venaient, les retours étaient positifs, il y a une forte empathie pour la chaine, on n’a pas honte de la regarder. Il y a cette connivence assez forte avec nos téléspectateurs.

« On n’a jamais cherché à écarter la ménagère de moins de 50 ans »

Le positionnement de RMC Découverte est-il amené à évoluer ?

Les téléspectateurs ont bien compris la ligne éditoriale de la chaine comme le prouvent les études : apprendre et se distraire ce n’est pas antinomique, tant que le fond est concret et les infos sont réelles et vérifiables. Certaines choses sont plus divertissantes, et permettent d’attirer les gens. Mais cela n’empêche pas que l’on continue nos Champs de bataille, Les Grains de sable de l’Histoire, La France des Mystères… Nous avons créé une dizaine de franchises dans le documentaire plus classique, et on continue ce travail en prime time. De plus, le nombre de productions originales a augmenté comme on va le voir tout au long de cette nouvelle saison.

Avez-vous le sentiment d’avoir réussi à instaurer des vrais rendez-vous et des cases clairement identifiables sur la chaine ?

Bien sûr ! Top Gear en est le parfait exemple. La case Histoire du vendredi sur la première et deuxième guerre mondiale est clairement identifiable. Pour la case du mardi soir, plus « surprise », les téléspectateurs viennent sur la chaine. Cependant, nous savons très bien qu’il y a toute la concurrence en face. Mais on ne baisse pas les bras et on veut proposer un maximum d’inédits, que ce soit productions ou acquisitions fraiches. C’est extrêmement important pour une chaine de la TNT.

Faites-vous attention à la programmation de la concurrence comme pour Top Gear lorsqu’il y a, par exemple, des compétitions européennes ?

Les compétitions de foot ne nous arrangent pas... Quand on a lancé Top Gear en 2015, RMC Découverte ne couvrait pas toute la France, il nous manquait toute la région Est et on a fait cependant ce pari. Et on a eu raison de le faire ! C’est la force d’Alain Weill (PDG de NextRadioTV et de SFR, NDLR) d’avoir dit « Le contenu et le programme frais, c’est le nerf de la guerre ». On en est l’exemple sur RMC Découverte. Après, il faut bien sûr avoir une ligne éditoriale claire, une qualité de programmes, une qualité d’investissement… Et le travail fait avec les producteurs en cinq / six ans est incroyable, on adore travailler avec eux et ils aiment tous travailler avec nous. Chaque année, on en intègre cinq ou six nouveaux, c’est notre volonté pour avoir cette nouvelle créativité et ce regard frais sur la chaine pour ne pas s’essouffler.

Avez-vous des obligations pour ouvrir votre antenne à de nouveaux producteurs ?

Non du tout. Cela se fait naturellement. On a une obligation d’investissements dans du programme inédit français bien évidemment, et on les dépasse largement avec une grille comportant 60% de productions jamais vu ailleurs.

« Escape est peut-être le programme le plus disruptif sur la chaine, entre le docu-réalité et un jeu d’aventures »

Vous lancez ce 29 août, l’adaptation française de Retour à l’instinct primaire

Et nous sommes le premier pays à l’adapter au monde ! Ce qui en fait un exemple pour les autres chaines. Aujourd’hui, nos programmes, développés par les producteurs français, ont un très fort taux d’ « exportabilité » comme Montana Wild, qui a déjà été prévendu en Angleterre, alors qu’on tourne avec quelqu’un qui a une réelle spécificité française…

Vous êtes cependant tenus de respecter des codes internationaux pour l’exportation et des bibles pour les adaptations comme Top Gear

Oui bien sûr, mais on a toujours cette petite spécificité ! Cependant, quand les Anglais de Top Gear viennent sur le plateau français, ils se disent « Waouh ! ». Et les équipes sont très fières de cela. On a utilisé et appris d’eux tout en l’adaptant à nous. Car nous n’avons pas les mêmes rythmes, on donne beaucoup plus d’informations qu’eux dans l’émission par exemple… Au final, des choses nouvelles apparaissent et tout le monde les utilise et s’en inspire à des niveaux différents. Nous sommes dans un monde en perpétuelle mutation en matière d’audiovisuel et de création.

RMC Découverte est-elle amenée à développer le genre « magazine » comme par exemple L’ombre d’un doute, Secrets d’Histoire… ?

Non je ne pense pas. Avec Top Gear par exemple, on est vraiment à la marge malgré cette partie plateau. Les road trip de Top Gear restent du documentaire.

Vous accueillez cette saison, Laury Thilleman pour Off roads, les routes de l’extrême. L’incarnation des programmes est-elle un objectif pour RMC découverte ?

C’est un objectif à partir du moment où c’est justifié. Quand on nous a proposé ce programme, j’ai commencé de suite à me poser des questions sur l’incarnation. J’ai eu Laury Thilleman dans la tête, Jean-Louis Blot (le producteur, NDLR) également. Elle est sportive, globe trotteuse, engagée, respectueuse de son environnement, elle a une intelligence humaine, elle avait vraiment tous les trucs pour bosser dans une équipe de garçons… Comme Philippe Lellouche a été une évidence pour Top Gear. Champs de bataille est incarnée par Serge Tignères, docteur en Histoire et réalisateur, il est vraiment dans le programme, et le fabrique... Maintenant, il y a des programmes que l’on n’a pas besoin d’incarner comme Retour à l’instinct primaire, car cela n’aurait pas de sens.

« Choisir un programme pour qu’un concurrent ne l’ait pas, ce n’est pas un bon choix »

Vous lancez également Escape, 21 jours pour disparaitre. Une vraie nouveauté pour RMC Découverte. Comment définiriez-vous ce genre de format ?

C’est peut être le programme le plus disruptif sur la chaine, entre le docu-réalité et un jeu d’aventures, du factuel d’aventures et de réalité (rires). C’est une première et on est heureux de le faire avec Endemol qui a un savoir-faire dans le domaine, ce qui est ultra rassurant. Et pour eux, travailler avec une chaine qui a des marqueurs radicalement différents de ce qu’est la télé-réalité aujourd’hui, ça les a intéressés, je pense. Ce qui nous intéressait véritablement dans Escape, c’est le rapport à la déconnexion. Car ça fait un peu peur, aujourd’hui, en deux secondes, quelqu’un qui sait un peu chercher peut tout connaitre de votre vie. Et puis, il y a cette grande partie de cache-cache géant, d’avoir ce terrain de jeu qu’est la France, de faire une expérience avec les téléspectateurs... Mais un de nos marqueurs est qu’il n’y a pas d’argent à gagner. On le fait pour le plaisir de se confronter, de vivre quelque chose d’humain assez fort… Ces éléments font que l’on a eu envie d’y aller.

Escape et Retour à l’instinct primaire sont deux formats qui avaient fait parler au MIP. Avez-vous l’intention de vous positionner sur des formats attendus plutôt sur des chaines ayant plus d’années d’expérience ?

Ce n’est pas parce que l’on est en 24 qu’on devrait se l’interdire ! En 2015, Top Gear a été un gros virage pour nous. Depuis, on peut tout faire tant que cela reste dans notre ligne éditoriale. Avec Escape et Retour à l’instinct primaire, on va essayer de continuer ce que l’on fait sur le terrain. Être sur le terrain, c’est notre univers, tout comme la force du témoignage, et de l’humain. C’est notre savoir-faire, notre ADN, notre marqueur.

Le succès de RMC peut agacer la concurrence. Y’a-t-il une réelle bataille pour sécuriser vos achats ?

Il y a toujours une bataille, car nous ne sommes pas dans la tête des autres chaines. Avec Top Gear cela a été épique. Au moment où on l’a voulu, évidemment tout le monde s’est dit « Pourquoi nous on ne l’aurait pas ! » alors que jusque là personne n’en voulait ! Cependant, il faut toujours être convaincu de ce que l’on va choisir. Choisir un programme pour qu’un concurrent ne l’ait pas, ce n’est pas un bon choix. Il faut être sûr du propos et de sa programmation. On se doit d’être agile et d’avoir un œil sur tout ce qui est proposé.

Avec une grille composée essentiellement de documentaires, pourriez-vous vous positionner sur des deals de coproduction pour de gros projets comme le fait, par exemple, France Télévisions avec la BBC ?

Bien sûr ! On n’a aucune interdiction sur le sujet. Si la BBC nous le demande, cela ne nous poserait aucun problème de coproduire avec d’autres chaines françaises ou internationales.