Au coeur de 28 minutes, l’émission d’actualité d’Arte
L’équipe de travail de 28 minutes, émission d’actualité quotidienne d’Arte, est matinale et enjouée. Ce jour-là, dès 9h15 une journée pleine et ordonnée s’annonce dans la fourmilière des locaux de ALP (Adventure Line Productions, société de production qui s’occupe également de Koh Lanta et Fort Boyard). Au 4e étage, une fois les portes d’une petite réception franchies, de grands espaces offrent une circulation abondante en journée, et une étendue inhabitée de bureaux et de cloisons au petit matin. À environ une demi-encablure de l’open space du Grand Journal, produit par KM Productions, se trouve celui de 28 minutes où les membres de l’équipe arrivent au compte-goutte, minute après minute. Nadia Daam, journaliste « nouveaux médias », débarque sur son lieu de travail avec une démarche assurée, un regard vigoureux, et l’œil américain. Le rédacteur en chef Norbert Bellaiche et la productrice Sandrine Beyne sont déjà à pied d’œuvre.
9h30 : La réunion de travail
À 9h30 tapantes, l’équipe est réunie au grand complet pour une studieuse réunion de travail où tous les sièges se tournent vers le rédacteur en chef, prenant la parole pour annoncer le chiffre d’audience de la veille. Puis, il est d’emblée question du sujet du jour, décidé et déblayé le jour précédent. En ce jour, Michaël Prazan, écrivain et réalisateur de documentaires, qui a publié Frères musulmans : Enquête sur la dernière idéologie totalitaire chez Grasset, occupera la première partie de l’émission. De ce point de départ amorcé par le rédacteur en chef, idées, remarques et choses à ajouter fusent pour enrichir le plan de la journée, en fonction de l’inaltérable actualité. Une « boite à idées » permet également de proposer des thématiques pour les jours suivants. Les sujets arrêtés sont « Frères musulmans, coupables ou victimes ? » et « La Culture, rempart contre la crise ? » Au terme de cette réunion d’une trentaine de minutes, où l’angle des questions d’actualité a été éclairci, des dizaines de personnes campent leur poste par pôle.
A la recherche des invités
La programmation est un peu à l’écart du corps principal de rédaction, mais transite tout le temps avec le reste de l’équipe. Ce jour, Pascale, Francesca et Julie occupent une « marguerite » soigneusement rangée et où le téléphone épousseté occupe une place éprouvante tant il est sollicité. Le motif principal de ce noyau dur de l’émission est de chercher, et de trouver, les invités du jour, en un temps limité. Le temps étant, comme le titre du programme l’indique, une donnée primordiale. Grâce à un carnet d’adresses bien fourni et à des trombinoscopes, elles se chargent, en fonction du thème décidé, de convier les meilleurs invités possible par rapport à l’actualité. Elles doivent, avant le déjeuner, s’être entretenues avec bon nombre d’intervenants potentiels et avoir percé leur position sur la question du jour. Entre 13 et 14 heures, un déroulé des invités est défini. Elles s’entretiennent pour définir le point de vue de l’invité et transmettent ensuite les informations ont récoltées aux fichistes.
De la préparation des interviews à la rédaction des fiches
Anne, Tristan et Alice décortiquent l’actualité pour donner les informations les plus judicieuses à Élisabeth Quin, présentatrice de 28 minutes. Ils se chargent de globaliser la pensée de l’écrivain, du réalisateur ou du journaliste invité le soir même en mettant en exergue de judicieuses citations émises par les principaux concernés. Élisabeth Quin, présente depuis le matin, est constamment informée et entretenue par les différents pôles, particulièrement au sujet des invités, dont elle prépare leur interview. Pour rappel, dans la première partie de l’émission, un invité avec une actualité ou une histoire particulière est face à Elisabeth Quin, Nadia Daam et un éditorialiste (Vincent Giret, Matthieu Croissandeau, Guillaume Roquette ou encore Renaud Dély en fonction des jours). Les fiches comprennent l’actualité de l’invité, son point de vue sur la question et son portrait dans la presse. Cécile, attablée avec les fichistes, s’emploie également à rédiger les revues de presse de l’actualité à traiter. Elle reste en lien avec l’AFP (l’Agence France Presse) toute la journée. De son côté, le rédacteur en chef, qui assure le lien permanent entre tous les pôles, s’assure notamment que le plan de l’émission transite et que son évolution, son développement naturel, soit su de tous au maximum à 14 heures. Tout le monde doit disposer du déroulé de l’émission.
Partie 2 > Des répétitions au tournage
16h30 : Les répétitions
Les répétitions précédant l’enregistrement de l’émission pour le soir même doivent se faire à 16h30, c’est dire que toutes les équipes techniques sont au fourneau. Le travail effectué dans la salle de montage remonte via un câble jusqu’au car régie. Sur le plateau, les discussions permettent une mise en situation optimale et un déroulement harmonieux de l’émission enregistrée. Les dernières finitions sont ajustées et les mécaniques révisées. À l’intérieur, Adrien Soland, le réalisateur, Christel, la scripte, Alex, l’opérateur synthétiseur, Jean-Ludovic, le truquiste, et Tom, le chef d’édition illustrant l’émission en direct sont bien installés et équipés, conducteur de l’émission sous les yeux. Ils forment la première ligne face aux écrans, légèrement à l’écart des ingénieurs du son. Une pléiade de manipulations sont nécessaires pour que les images et les musiques soient toujours raccord avec le plateau. Les points délicats comme le lancement de l’émission ou l’apparition des livres à l’écran se règlent pour que le lancement soit effectué à 18 heures, dans les meilleures conditions. Pendant les séquences, les échanges sont détendus sur le plateau.
18h00 : L’enregistrement de l’émission
Le déroulement du programme s’opère sans fausse note, dans les conditions du direct. L’enregistrement, devant se situer entre 39 minutes 50 et 40 minutes 50, se déroule sans heurt tant la machine est bien huilée. L’expérience, alliée à la communication permanente de tous, permet aux invités de faire découler leurs raisonnements avec aisance. À l’arrière des premiers cités, sur d’autres écrans de contrôle, Sandrine Beyne, Norbert Bellaiche et Amandine, la chef des infos, portent leur regard sur tout ce qui se déroule en plateau. Casque vissé et chronomètre activé, la productrice donne des indications d’ordonnancement, et Norbert de contenu. Les consignes données de micro à oreillette permettent d’abréger une question lancinante, ou d’en supprimer, de balayer une quelconque inexactitude dans les propos ou de donner la parole spécifiquement à quelqu’un. Faute de temps, Élisabeth Quin devra raccourcir un échange de quelques secondes pour clore l’émission dans les temps. La toute fin, synonyme de satisfaction, est signée à 18h37.
Journée tenue par une cadence infernale qui se révèle quotidienne. Le format exige une réactivité de tous les instants et, manifestement, la cohésion émanant de cet open space de 28 minutes atteste du rendu de qualité de l’émission dont la mécanique n’est pas prête d’être enrayée.